NINETEEN – ANTHOLOGIE D’UN FANZINE ROCK 1982-1988

[Rock] Extraits de l’anthologie du zine Nineteen (Fondeurs deBriques 2016)

NINETEEN ANTHOLOGIE D’UN FANZINE ROCK (1982-1988)

http://www.la-petroleuse.com/punk-rock/4431-nineteen-anthologie-dun-fanzine-rock-1982-1988.html

Cette anthologie est une sélection d’articles parus dans le fanzine Nineteen qui, entre 1982 et 1988, s’est fait l’écho de cette effervescence rock&roll qui ne se reconnaissait pas dans la new wave ou dans la grosse cavalerie des charts. L’anthologie reprend de nombreux papiers, alternant articles de fond et interviews, consacrés aux Byrds, Love, MC5, The Sonics, Sky Saxon, The Chocolate Watch Band, The Flamin’ Groovies, Syd Barrett, Elliott Murphy, Alex Chilton, The Replacements, The Cramps, The Gun Club, R.E.M., The Plimsouls, The Fleshtones, X, The Dream Syndicate, The Barracudas, The Soft Boys, The Undertones, Wilko Johnson, Dr Feelgood, The Prisoners, The Milkshakes, Nikki Sudden, Radio Birdman, The Saints, The Sunnyboys, Died Pretty, The Scientists, The Nomads ou, bien évidemment, les Dogs auxquels Nineteen a emprunté le titre d’une chanson comme nom de baptême.

nineteenExtrait: (p.46): « En 68, le MC5 apparait ainsi comme un groupe hors du commun. Rob Tyner est un hurleur myope et grassouillet qui s’époumone au-delà de ses limites, passant du falsetto de « Rambin’ Rose » à la folie grondante de « Kick out the Jams » avec une énergie à faire saliver une portée de punks de la troisième génération. Fred « Sonic » Smith avec sa Mosrite immaculée et Wayne Kramer, son pendant frisé et narquois, sont deux guitaristes brillants et batailleurs, vrais symboles du Five et duo de rêve. Sans oublier la paire de brutes qui tente tant bien que mal de coller à la route: Dennis Thompson aux peaux et Michael Davis à la basse. Les cinq en action, cela donne « Rocket reducer » ou « Come together », une approche musicale qui tient plus de l’équarissage que du solfège ou de sévères coups de tabac comme le final du gigantesque « Motor City is burning », chapardé pour la bonne cause à John Lee Hooker, leur voisin. Même les Troggs sont de la fête, qui voient le riff de base de « I want you » servir de charpente aux six minutes de déglingue à peine vertébrées de « I want you right now ». »

Extrait (p.99): « Les Groovies en France. Un évènement suffisamment rare pour qu’on ait eu envie de prendre date. Petit un: les voir sur scène. Petit deux: planter un micro devant Cyril Jordan. Un des deux seuls survivants (l’autre étant le bassiste George Alexander) de la formation originale lancés dans un nouveau round, après sept ans d’absence et malgré un insuccès chronique, il était aussi l’un des derniers Groovies à qui Nineteen n’avait encore jamais posé ses petites questions. Partagés entre l’estime qu’on peut légitimement nourrir vis-à-vis de l’auteur d’un album comme Shake some action et le désir d’interviewer sans ménagement le responsable d’un disque désappointant comme le récent One night stand, nous sommes allés le voir dans sa loge du Bikini, à la suite d’un concert qui en avait conquis certains, déçus d’autres. »

Extrait (p.193): « Et cette nuit diabolique qui n’en finit pas. C’est encore le sonorisateur fou qui, non content d’avoir massacré le son pendant toute la tentative de concert, refait parler de lui. Il pique le camion du groupe, abandonnant sur place le matos, kidnappant par contre un Gordon qui à cette heure flirte dangereusement avec le coma éthylique et décampe plein pot, direction le nord… Et oui, ami lecteur, le feuilleton rebondit mais en attendant la suite, une page de publicité: « le meilleur groupe australien du monde s’appelle les Headstones ». Fin de la réclame, Aahha-doub-doub-doub. Et nous retrouvons Gordon Spaeth, saxophoniste des Fleshtones devant l’éternel, évanoui au fond d’un camion piloté par un ricain siphonné en plein trip Retour vers l’enfer et qui fonce dans la nuit auvergnate étoilée vers une destination inconnue, qui s’avérera plus tard être Orléans (pourquoi Orléans?) Quand on aura signalé qu’un peu plus tôt dans la soirée, Gordon avait mis un point d’orgue à sa prestation scènique en fracassant son saxophone, on mesurera l’étendue du désastre. Pendant ce temps là, les autres Fleshtones, restés à Livinhac s’employaient à contacter leurs potes, le chapitre d’Orléans des Hell’s Angels. Ils y réussirent finalement et les bikers interceptèrent les fuyards, éjectèrent le sonorisateur et ramenèrent le camion et Gordon « Oh ma tête » quelques centaines de kilomètres plus au sud. »

Extrait (p.229): « 25 juin, les Cudas achèvent leur Spring Banzaï Tour dans les brouillards du nord de l’Aveyron. Dernier concert, dernier rappel; Jeremy secoue sa grosse tête en sueur sur les filles du premier rang, Robin aligne ses solos avec son élégance habituelle et à l’autre bout de la scène, Jim et Chris, le bon géant et le farfadet, donnent une énième version du pas de deux boogie. Et Mark? il bat, mec, il bat. Gamine aussi est sur scène: quatre guitares, deux basses… le son déferle en vagues monstrueuses. Le morceau? c’est « Slow death ». Reprendre « Slow death »! Etonnez vous après que ces gens aient mauvaise presse. Quoi de plus facile que de descendre en trois arguments un groupe qui pose en casquette Donovan, après avoir arboré des panoplies surf city ? Quoi de moins hip que des musiciens qui avouent être des fans ? Le plus étonnant, c’est que les Barracudas se rendent parfaitement compte de l’ambiguïté de leur position. Et c’est cela même qui fait toute leur force. Car conscients de leur vulnérabilité, ils se refusent pourtant à adopter une attitude plus défendable. « Slow death », Robin Wills l’a joué dans tous les groupes qu’il a traversés avec comme unique raison que c’est pour lui le parangon de la guitare rock. Pas question de changer sous prétexte que la mode est passée. Les Barracudas sont des sortes de Don Quichotte du rock’n’roll. Ils croient à une espèce de beat absolu et courent après l’ultime combinaison 6-12 cordes. »

Extrait (p.389): « Cette année là, les Dogs qui ne se sont jamais aventurés au delà de la côte normande, font quelques concerts à Paris et, fin 74, ils participent au fameux tremplin du Golf Drouot. Ils ont des dégaines dans le style de l’époque, cheveux longs, pattes d’eph, Zox a une tronche à la Marc Bolan avec ses boucles brunes et son écharpe. Seul Mimi a la même tête qu’aujourd’hui et déjà son air sombre. Le passage au Golf est une véritable péripétie dans le scénario plutôt classique des débuts du groupe. D’abord, parce qu’ils se font jeter de la boite, à coups de pied au cul, à cause de leurs effronteries par trop turbulentes et, ensuite, parce que l’épisode est raconté par Philippe Manœuvre dans Rock & Folk. Manœuvre a rencontré quelques jours plus tôt dans un train, un ami des Dogs, Frank Peeters, photographe attitré du groupe. Il lui parle d’eux et du concert en prévision. Le concours de cette rencontre et d’une grève des postes prolongés qui prive le journal de son courrier des lecteurs, fait que la seule lettre du numéro de décembre 1974 est une missive de Manœuvre qui raconte le concert avec autant de verve que d’enthousiasme. Le ton de la lettre est complètement emballé mais aussi un peu obscur; il s’enflamme pour les Dogs mais il ne précise pas qui ils sont ni d’où ils viennent et se contente de décrire le bordel qu’a été le concert. Ce premier contact avec la presse est à la fois original et percutant mais n’est pas d’une grande utilité pour un groupe qui tourne à peine et n’a pas encore de disque. »